En ce moment, je travaille sur mon prochain roman.
Dit comme ça, vous m’imaginez peut-être derrière l’ordi, sérieuse, mes lunettes sur le nez, rédigeant chaque jour un quota de signes soigneusement prédéfini.
La réalité, c’est plutôt que :
je pétille d’idées quand je marche, beaucoup moins quand j’ouvre mon fichier
je lis plein de trucs autour du thème, pour nourrir le propos, et je pars dans tous les sens : c’est comme ça que je me suis retrouvée plongée dans L’Imitation de la bienheureuse Vierge Marie, un texte du quinzième siècle, écrit par un moine allemand — je ne recommande pas à une amie,
j’interromps des discussions qui ne portent pas du tout sur ce projet de livre en disant : “attends c’est hyper intéressant ce que tu viens de soulever, je prends des notes, faut TROP que j’en parle dans mon roman” et le plus stupéfiant c’est que souvent c’est vraiment pertinent
j’écoute obsessionnellement la même chanson qui m’aide à mieux imaginer certaines scènes
je n’arrive pas à lire le moindre roman sans le disséquer dans tous les sens et le comparer à mon projet
j’ai un milliard de brouillons de mails qui contiennent des ébauches de scène, rédigées dans le métro ou en attendant un rendez-vous
dès que je conscientise une émotion ou une pensée qui me tient à cœur, je réfléchis à la façon de l’intégrer dans le roman
je prépare des dossiers de bourse littéraire : un exercice à mi-chemin entre la déclaration de revenus pour les impôts et le concours d’écriture que, lui non plus, je ne recommande pas à une amie.
Une effervescence joyeuse, exaltante, fatigante et bordélique.
Vous allez en entendre parler dans les mois qui viennent, croyez-moi.
Notamment quand je serai dans la fameuse phase “mon Dieu, tout ce que j’écris est merdique, ce roman n’a aucune chance de voir le jour, pourquoi ai-je eu cette folle ambition, je veux disparaître sous le poids de ma médiocrité, blablabla”.
(Note aux auteurices qui débutent : cette phase est inévitable et souvent elle revient à plusieurs reprises au cours du projet. Trouvez une épaule amicale sur laquelle pleurer pendant quelques semaines et remettez-vous au travail.)
Dans l’immédiat, j’ai une question pour vous.
De la même façon que Comment devenir lesbienne jouait avec les codes du développement personnel, un genre trop vite méprisé selon moi, je voudrais que ce prochain roman joue avec les codes de la production culturelle feel-good, ces œuvres pensées pour mettre de bonne humeur, sans trop de prétention côté profondeur du message.
(Et ceux des Évangiles, mais ça on en discutera une autre fois.)
J’aimerais donc savoir :
Qu’est-ce qui, pour vous, est une œuvre “feel-good” ?
A quel livre, à quel film retournez-vous régulièrement parce qu’il vous met du baume au cœur ?
Et selon vous, qu’est-ce qui vous plaît particulièrement dans ce film ou ce livre ? Qu’est-ce qui vous y attache, sur la forme ou sur le fond ?
Vous pouvez me répondre en commentaire ou en cliquant sur “répondre”.
Ca m’aiderait vraiment !
Merci et à la semaine prochaine.
P.-S. : avez-vous signé l’initiative citoyenne européenne pour faire de l’avortement un droit européen ?
On se plaint souvent qu’on sait pas quoi faire pour lutter.
Là, on a une super proposition, avec de groooosses conséquences potentielles à la clé, qui prend 2 minutes, et c’est par ici :
le genre feel-good, c'est des oeuvres où j'ai la certitude que la situation finale va être favorable aux personnages (pas forcément tout est bien qui finit bien, mais même si iels n'obtiennent pas ce qu'iels désirent iels sont suffisamment en paix pour savoir qu'iels vont aller de l'avent fortts des leçons apprises pendant le récit), des oeuvres qui portent un regard de tendresse et de compassion sur leurs personnages (principaux ou "antagonistes", lesquels sont humaniséés), des oeuvres avec des "bons sentiments", qui portent des valeurs comme la bienveillance et la solidarité. Elles peuvent dépeindre la construction de communauté, la résolution de conflits, l'acceptation de ses ombres et l'apprentissage de comment faire mieux. Ce sont des récits optimistes. Ca peut être des comédies aussi. Parmi mes oeuvres de réconfort, il y a The marvelous Mrs Maisel : les personnages sont délicieusement timbréés chacunn à leur manière et le récit est porté par un vent de fraicheur et de légère absurdité. Anne de Green Gables aussi, pour la manière dont les personnages s'attachent progressivement au personnage éponyme en dépit de ses excentricités.
La série Ted Lasso! L’histoire d’un coach de football américain super enthousiaste qui coach une équipe de foot. Je suis contente d’avoir regardé malgré le fait que j’en ai rien à carrer du foot. Parce que les personnages sont juste super gentils entre eux, solidaires, attentionnés, et de voir des hommes qui se soutenaient, s’écoulaient et s’encourageaient c’était trop safe à vivre. Pareil pour Becky Chambers l’écrivaine de sci-fi cosy et queer… franchement mes trucs feel good c’est juste des gens qui sont gentils entre eux et un univers où il y a de la solidarité. Beaucoup d’histoires sont basées sur la violence et le conflit, mais je pense qu’on sous estime à mort les utopies.